Les marchés réagissent déjà comme si la victoire du républicain était acquise. Les Bourses européennes évoluent nettement dans le vert ce mercredi matin et Wall Street est attendu en forte hausse à l’ouverture. Le « Trump trade » pousse le bitcoin à un nouveau record. Le billet vert et les taux américains bondissent.
Par Sophie Rolland, Florian Maussion – Les Echos
Les marchés réagissent fortement à l’avancée de la vague rouge, mercredi matin. Les résultats définitifs ne sont pas connus, mais les républicains ont d’ores et déjà pris le contrôle du Sénat et Donald Trump a été donné vainqueur dans les Etats clés de Géorgie, de Caroline du Nord et surtout de Pennsylvanie.
Les sondeurs évaluent désormais à plus de 90 % la probabilité d’une victoire de Donald Trump. Le baromètre électoral du « New York Times » est à 92 %, et le site de paris rémunérés en ligne Polymarket l’estime à 97 %.
Le bitcoin, actif financier par excellence du « Trump trade » – l’ensemble des paris qui seraient, selon les marchés, gagnants en cas de victoire du républicain – a battu un nouveau record. Il a, pour la première fois, franchi la barre des 75.000 dollars, dans la nuit. L’ex-président s’est engagé à faire des Etats-Unis « la capitale mondiale du bitcoin et des cryptomonnaies » et veut assouplir le cadre réglementaire des cryptos.
Le dollar et les taux sont, eux aussi, en forte hausse. Le roi dollar progresse de plus de 1,50 % face aux devises de ses principaux partenaires commerciaux (indice DXY). L’euro, en baisse de près de 2 %, a franchi 1,075 dollar. Le billet vert n’avait pas connu une telle poussée de fièvre depuis février 2023, selon Bloomberg. Le mouvement est d’autant plus fort qu’en début de semaine, avec la légère remontée de la cote de Kamala Harris, le « Trump trade » avait perdu du terrain sur les marchés.
Le rendement des emprunts d’Etat américains à 10 ans a bondi de 15 points de base et dépassé 4,40 %. Il se rapproche de son pic de début juillet. « Dans la situation actuelle, une administration Trump serait annonciatrice d’une dégradation des finances publiques. Les affirmations de Donald Trump selon lesquelles les recettes douanières provenant de l’augmentation des tarifs généreraient suffisamment de revenus pour combler le déficit fédéral sont sans fondement », estime Axel Botte, responsable de la stratégie marchés chez Ostrum.
De quoi faire remonter la prime offerte aux investisseurs pour détenir de la dette américaine. Avec un risque, selon Axel Botte : « Les Etats-Unis attireraient des montants toujours plus importants d’épargne du reste du monde grâce à cette prime, ce qui pourrait déstabiliser de nombreuses économies. »
Vers une ouverture de Wall Street dans le vert
Les Bourse européennes ont réagi positivement à l’imminence de la victoire du candidat républicain. A 10 heures, le CAC 40 progressait de 1,93 % tandis que le Footsie britannique et le Dax francfortois prenaient respectivement 1,38 % et 1,28 %. A Wall Street, les contrats à terme laissent aussi augurer une ouverture nettement dans le vert, le Dow Jones et le S&P 500 étant d’ores et déjà attendu au-delà des 2 %.
Avant même que le candidat républicain ne prenne une avance quasi décisive, les Bourses asiatiques avaient déjà commencé à prendre en compte sa possible victoire. Les actions ont progressé au Japon et en Australie, mais ont légèrement reculé à Hong Kong.
Pro-croissance et potentiellement inflationniste, la politique « America First » proposée par le candidat républicain profiterait aux entreprises américaines, en particulier celles dont l’activité est essentiellement domestique, et à la consommation. Donald Trump veut prolonger les réductions d’impôts accordées aux ménages en 2017 qui doivent expirer l’année prochaine, et en ajouter de nouvelles.
Du côté des entreprises, le républicain souhaite abaisser le taux d’imposition des sociétés – actuellement 21 % -, à 20 % voire 15 %. Il pourrait également rétablir certains avantages fiscaux dont ont pu bénéficier les entreprises par le passé, comme les amortissements immédiats des investissements en capital et un assouplissement des limites sur les déductions d’intérêts.
Les hausses de tarifs douaniers envisagées – un taux de 60 % sur les importations chinoises et de 10 % à 20 % sur le Japon ou l’Europe – auraient un effet inflationniste. Quant à la politique anti-immigration, elle risque de créer des tensions sur le marché du travail.
Le succès de Trump quasi-certain et la majorité des Républicains au sénat acquise, les marchés vont désormais scruter l’évolution de la course à la Chambre des représentants, où une majorité démocrate entraverait l’action de la Maison Blanche. « Dans le cas d’un Congrès divisé et en l’absence de réforme fiscale ambitieuse, les espoirs de soutien additionnel à l’économie américaine sur lequel table une partie des investisseurs risquent de s’estomper et de freiner la dynamique haussière des marchés d’actions », pointe Michaël Nizard et Nabil Milali chez Edmond de Rothschild Asset Management.