Immobilier : faut-il vraiment profiter de la niche fiscale Pinel avant sa disparition ?

Sauf coup de théâtre, le célèbre dispositif d’immobilier locatif va tirer sa révérence fin 2024. Les promoteurs en profitent pour lancer des offres commerciales et mettre en avant des « opportunités » d’investissement. Faut-il s’en saisir ?

Par Marie-Eve Frénay - Les Echos

C’est la dernière ligne droite pour faire un Pinel. Dix ans après sa création, ce célèbre dispositif d’investissement locatif prendra fin le 31 décembre prochain, sauf ultime coup de théâtre. Sa non-reconduction en 2025 avait été actée mi-2023 dans le cadre du Conseil national de la refondation consacré au logement. A cette occasion, l’exécutif avait rappelé sa volonté de mettre un terme à cet outil de défiscalisation, après avoir déjà durci, au 1er janvier 2023, les contraintes pour obtenir la réduction d’impôt la plus élevée.

Bien connu des investisseurs locatifs, le Pinel permet d’acheter un bien neuf en zone tendue (A bis, A et B1) tout en bénéficiant d’une réduction d’impôt d’un montant de 9 % à 21 % du prix d’acquisition en fonction des caractéristiques d’usage et de confort du bien ainsi que de la durée de location. En contrepartie, le bailleur doit s’engager à louer l’appartement, au moins six ans, à des ménages dont les ressources ne dépassent pas un plafond défini réglementairement et pour un loyer également encadré.

Offre abondante

Malgré la date très proche de la fin du dispositif Pinel, l’offre est abondante, assurent les promoteurs. « Chez Bouygues Immobilier, il y a des biens éligibles disponibles sur l’ensemble du territoire », explique Bernard Chanteux, directeur général adjoint du constructeur. « Nous avons une offre très importante, de l’ordre de 5.000 lots. On regarde donc de très près les opportunités en Pinel pour nos clients », souligne aussi Jean-Philippe Grima, directeur commercial chez Nexity.

Il faut dire que l’année 2024 s’avère loin d’être faste pour le secteur de l’immobilier neuf dans son ensemble et le Pinel en particulier. « Les ventes de Pinel ont baissé de 75 % par rapport au rythme de croisière », alerte ainsi Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). « Le Pinel a représenté jusqu’à 55 % de notre commercialisation auprès des particuliers avant la remontée des taux, contre 40 % en 2024 », souligne également Bernard Chanteux.

Nouvelles campagnes promotionnelles

Pour relancer quelque peu la machine, les promoteurs sensibilisent sur la fin prochaine du dispositif de défiscalisation. « Depuis le début de l’année, on sait que le Pinel va s’arrêter. Au niveau marketing et publicitaire, on a donc fait des campagnes pour passer le message que 2024 est l’année des opportunités en Pinel », indique Bernard Chanteux. Si des campagnes du type « frais de notaires offerts » sont assez couramment proposées, certains promoteurs affichent des offres commerciales plus innovantes et réservées aux investisseurs en Pinel.

« On va lancer une campagne nationale à compter de mi-septembre et jusqu’à mi-octobre à destination des clients investisseurs. L’offre vise à augmenter le rendement locatif pour le réaligner avec celui des placements financiers », lance Jean-Philippe Grima, sans livrer plus précisément la teneur de cette campagne éphémère. « On a une fenêtre de tir très courte avant la fin du dispositif, on doit leur dire qu’il y a de véritables bonnes affaires à réaliser », martèle le porte-parole de Nexity.

Effectivement, à écouter les promoteurs, il y a une certaine urgence à agir. « Pour qu’un acte notarié puisse être signé avant le 31 décembre prochain, il faut que le contrat de réservation [l’équivalent, dans le neuf, du compromis de vente dans l’ancien, NDLR] soit signé avant fin octobre », indique Bernard Chanteux. « Le client doit se positionner au plus tard au 15 ou 20 octobre, pour avoir le temps de décrocher son financement et de passer chez le notaire avant le 31 décembre », abonde Jean-Philippe Grima.

Mise à jour favorable du zonage

Intervenue cet été, la mise à jour du zonage immobilier apporte d’autres éléments commerciaux à faire valoir auprès du public. « Ce nouveau zonage crée des opportunités pour les investisseurs. Des immeubles autrefois en zone B2 ou C sont passés en B1. Ils deviennent donc éligibles à la réduction d’impôt, sans que leur prix de vente ait bougé », analyse le porte-parole de Nexity.

En effet, par un arrêté du 5 juillet 2024 publié au « Journal officiel », 865 communes ont changé de catégorie, dont près de 700 communes nouvelles appartenant désormais à la zone B1. Un simulateur accessible depuis le site Service-public.fr permet de connaître le zonage des municipalités.

D’autres communes, déjà pauvres en logements locatifs, sont montées d’un cran dans l’échelle de Richter des tensions immobilières. C’est le cas de 142 villes reclassées en zone A (dont les villes étudiantes de Rennes et Nantes) et de 48 appartenant désormais à la zone A bis, soit le même niveau que Paris. Ce n’est pas anodin. Car cette catégorisation est importante pour juger de la rentabilité d’un investissement Pinel.

Le zonage définit en effet le loyer maximum applicable hors charges. Pour un bail conclu en métropole en 2024, il est ainsi de 18,89 euros par mètre carré en zone A bis, de 14,03 euros en zone A, de 11,31 euros en zone B1. En passant de catégorie B1 à A, le loyer applicable progresse donc de 2,72 euros par mètre carré.

Mais attention ! cet effet d’aubaine peut se révéler illusoire. Car ces plafonds, certes rehaussés, peuvent rester très en deçà de la réalité des loyers pratiqués, de sorte que la réduction d’impôts ne compensera pas intégralement le manque à gagner sur les revenus locatifs. Alors, avant de signer cet automne pour l’achat d’un investissement Pinel, interrogez-vous sur l’équilibre financier global du projet.